Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 1.djvu/439

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1656

38. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MÉNAGE[1].

Si Montreuil[2] n’étoit point douze fois plus étourdi qu’un hanneton, vous verriez bien que je ne vous ai fait aucune malice ; car il se chargea de vous faire savoir que je ne pouvois vous aller prendre, et me le promit si sérieusement, que croyant ce qu’il me disoit qu’il n’étoit plus si fou qu’il avoit été, je m’en fiai à lui, et c’est la faute que je fis. Outre cela, le temps épouvantable qu’il fit vous devoit assez dire que je n’irois point au Cours[3]. Tout cela vous fait voir que je n’ai aucun tort : c’est pourquoi je vous conseille, puisque vous êtes revenu de Pontoise, de n’y point retourner pour vous pendre ; cela n’en vaut pas la peine, et vous y serez toujours reçu quand vous voudrez bien, mon cher. Croyez que je ne suis point irrégulière pour vous, et que je vous aime très-fort.

    de Ménage. Comme en 1668, le 23 juin est un samedi et non un vendredi, on avait, pour pouvoir la mettre à cette année, supprimé le mot vendredi, qui est dans l’autographe, et que nous avons naturellement rétabli. Nous ne voyons pas ce que ce billet perd à se trouver à sa vraie date, au vendredi 23 juin 1656 : c’est l’année où Ménage donna la seconde édition de ses poëmes (l’achevé d’imprimer est du 8 avril). Mme de Sévigné avait trente ans ; et ne va-t-il pas bien à cet âge, ce souvenir sans tristesse des premières années de la jeunesse, et du temps que lui rappelaient ces vers où le poète la nommait

    Des ouvrages du ciel le plus parfait modèle, etc. ?

    Le seul regret que nous donne cette transposition à laquelle l’original du billet nous oblige, c’est qu’elle renverse tout l’ingénieux édifice de conjectures que Walckenaer (tome III, p. 117) avait construit sur cette date.

  1. Lettre 38. — i. On a placé cette lettre à l’année 1656, et nous la laissons à cette place, tout en reconnaissant que rien n’indique l’année où elle fut écrite. Le ton en est même si différent de celui de la précédente, qu’on mettrait volontiers plus de distance entre les deux.
  2. Voyez la note i de la lettre 6.
  3. La promenade à la mode était le Cours-la-Reine, sur les bords de la Seine, entre les Tuileries et Chaillot. Voyez la Société française au XVIIe siècle, par M. Cousin, tome II, p. 308 et suivantes.