1695 chose que je n’en abuse, j’en prends dans l’excès ; ma petite absinthe est le remède à tous maux.
Vous me demanderez, mon amie, pourquoi, me portant aussi bien que je vous le dis là, je ne suis point allée à Chaulnes ; et je vous répondrai que je me trouve comme les personnes qui deviennent avares par être riches : depuis que j'ai un peu de santé, je la ménage beaucoup ; le vilain temps m'avoit alarmée ; si j’avois prévu qu`il pût faire aussi beau qu’il fait présentement, je crois que je me serois embarquée pour ce grand voyage ; mais je me garde pour Dampierre[1], et je fais très-facilement de ma maison une maison de campagne : je me promène les matins sur mon rempart[2], et je passe les aprés-dînées assez solitairement. La cour d`Angleterre est à Fontainebleau[3] ; ils ont des comédies, des fêtes, et s’ennuient, à ce qu’ils disent, et tant pis pour eux. Mme la marquise de Grignan[4] ne veut voir personne ; c`est ce qui m`a empêchée de me présenter à sa porte aussi souvent que j'aurois fait. M. de Chaulnes, qui sait forcer les portes, dit qu`elle est très-aimable. M. de Coulanges est allé à Chaulnes ; ils reviendront tous dans un mois, et c'est tout à l`heure. L’abbé et moi ne laisserons point ignorer à Mme de Sanzei tout ce que vous dites pour elle. Je
- ↑ Lettre 1431. — 1. Terre située auprès de Chevreuse, que le duc de Chaulnes venait d’acheter à vie. Voyez ci-dessus, p. 295, note 5, et la lettre suivante, p. 322.
- ↑ 2. Mme de Coulanges habitait alors la rue des Tournelles (voyez la lettre du 21 janvier précédent, p. 232). Sa maison avait une sortie sur l’ancien cours (appelé encore boulevard ou rempart dans le Dictionnaire de Paris de Hurtaut et Magny , I779) : voyez tome IV, p. 430, note 3.
- ↑ 3. Le roi et la reine d’Angleterre étaient arrivés à Fontainebleau le 28 septembre au soir. Voyez la Gazette du 1er octobre.
- ↑ 4. La jeune marquise de Grignan était partie pour Paris au commencement du mois avec son père. Voyez la lettre précédente, p. 316.