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SUR MADAME DE SIMIANE. 9

droit et modéré1, qui ne voulut jamais être en révolte contre l’Église ; elle témoigne souvent son dégoût et son horreur pour les extravagances auxquelles donnèrent lieu les prétendus miracles du diacre Paris. D’un autre côté, sa piété profonde ne connaissait pas l’intolérance. Dans sa lettre sur Voltaire, adressée à d’Héricourt2, elle exprime sa pensée, en termes très-dignes, très-résolus, mais adoucis aussitôt par le témoignage de la plus touchante amitié, à un homme qui ne partageait pas toute l’étendue de sa foi ; elle trouve toujours moyen, quand la circonstance l’exige, de donner une leçon discrète à ceux qu’elle aime le plus. Fort éloignée de toute affectation, de tout pédantisme religieux, elle n’aborde ces matières délicates que lorsqu’elle y est en quelque sorte conviée. Avec quel tact exquis elle laisse alors tomber de sa plume l’insinuation affectueuse, le conseil indirect qui peuvent pénétrer dans les âmes, dont elle pense à bon droit que l’aigreur et la violence ne rencontreront jamais le chemin !

On sait que ses scrupules religieux ne furent pas étrangers

l’anecdote. Ajoutons encore que les mots : « il mourut….à pareil jour qu’il avait signé….. l’arrêt », ne sont aussi qu’un à peu près. L’arrêt est du 10 octobre, le Bret mourut dans la nuit du 13 au 14 ; le seul rapport est que le 10 en 1731 tombait, comme le 13 en 1734, au mercredi.-- On pourrait voir une allusion aux persécutions ou tracasseries dont Mme de Simiane avait été l’objet, de la part de l’intendant et premier président le Bret, dans cette phrase de la lettre du 24 septembre 1734 à d’Héricourt : « je suis très fâchée sans être étonnée, des dernières folies du pauvre Cardinio : je l’ai toujours cru hors de son bon sens. » Le Bret portait comme son père le prénom fort peu usité de Cardin. Il est juste d’ajouter que cet homme

d’une grande capacité laissa après lui de vifs regrets. Dans une lettre adressée au marquis de Caumont, d’Ànfossy applique à l’intendant de Provence le fameux vers d’Horace (livre I, ode XXIV, vers 9)

Multis ille bonis flebilis occidit.

Le savant évêque d’Éleuthéropolis, J. Fr. Fouquet, écrivait de Rome au même marquis de Caumont : «M. le Bret avoit l’estime universelle. »

1. Voyez la lettre du 3 décembre 1736.

2. Voyez le dernier alinéa de la lettre 4 d’Héricourt, du 28 avril 1735.