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Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 4.djvu/238

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1675Toussaint. Vous faites bien, ma fille, de ne vouloir point oublier l’italien : c’est une honte ; je fais toujours comme vous, j’en lis un peu.

Ce que vous dites de M. de Chaulnes est admirable. On roua hier tout vif à Rennes un homme qui confessa avoir eu le dessein de le tuer. C’est le dixième qui a eu ce dessein : pour celui-ci, il méritoit bien la mort. Les médecins de ce pays-ci ne sont pas si complaisants que ceux de Provence, qui accordent par respect à M. de Grignan qu’il a la fièvre ; ceux-ci compteroient pour rien une fièvre pourpreuse[1] au gouverneur, et nulle considération ne pourroit leur faire avouer que son mal fût dangereux. On vouloit, en exilant le parlement, les faire consentir que pour se racheter on bâtit une citadelle à Rennes ; mais cette noble compagnie voulut obéir fièrement, et partit plus vite qu’on ne vouloit ; car tout se seroit tourné en négociation ; mais on aime mieux les maux que les remèdes. Roquesante viendra bien chargé d’indulgences ; ce que vous lui proposez pour les rendre utiles est bien plaisant : le P. Brocard en entendra encore parler.

Notre cardinal est à Commerci comme à l’ordinaire ; le pape ne lui laisse pas la liberté de suivre son goût[2].

Vos conseils suivent bien le leur quand ils vous donnent cinq mille francs[3]. Cette somme est devenue bien incontestée ; c’est dommage qu’elle ne soit plus grande,

  1. Dans l’édition de 1754 : « fièvre pourprée. »
  2. Voyez tome III, p. 459, note 1.
  3. « Toujours arguant de la teneur de l’édit de 1639, l’assemblée refusait d’imposer à la province une nouvelle surcharge pour l’entretènement des troupes du gouverneur ; mais elle accordait la gratification de cinq mille livres au comte de Grignan, en considération a de tant de bons offices qu’il a rendus et qu’il rend encore à la province. » (Walckenaer, tome V, p. 330 et 331.)