1676Je vous plains fort pour les maux que la guerre fait à vos sujets ; mais je ne plains guère les Bretons en général, qui sont assez fous pour s’attirer mal à propos l’indignation d’un aussi bon maître que le nôtre. Je voudrois bien pouvoir aller à Paris comme vous, ou que vous eussiez affaire à Bourbilly pour deux ou trois mois.
Adieu, ma belle cousine : si vous trouvez du plaisir à m’appeler comte, ne vous en contraignez pas ; je veux bien être votre comte[1], de tous les sens dont vous le pouvez entendre.
DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.
Vous pouvez remplir vos lettres de tout ce qu’il vous plaira, et croire que je les lis toujours avec un grand plaisir et une grande approbation : on ne peut pas mieux écrire, et l’amitié que j’ai pour vous ne contribue en rien à ce jugement.
Je ne dis plus mon chapelet : à mesure que je suis avancée dans l’envie d’être dévote, j’ai retranché cette dévotion, ou pour mieux dire cette distraction.
Vous me ravissez d’aimer les Essais de morale : n’avois-je pas bien dit que c’étoit votre fait ? Dès que j’eus commencé à les lire, je ne songeai plus qu’à vous les envoyer ; car vous savez que je suis communicative, et que je n’aime point à jouir d’un plaisir toute seule. Cette règle seroit bonne à introduire parmi les amants, au lieu d’être
- ↑ Il y a conte (comme on écrivait alors pour compte), dans la copie de Bussy.