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1676
539 — DE MADAME DE SÉVIGNÉ
À MADAME DE GRIGNAN.
À Vichy[1], mardi 19e mai.

Je commence aujourd’hui à vous écrire ; ma lettre partira quand elle pourra ; je veux causer avec vous. J’arrivai ici hier au soir. Mme de Brissac avec le chanoine[2], Mme de Saint-Hérem et deux ou trois autres me vinrent recevoir au bord de la jolie rivière d’Allier : je crois que si on y regardoit bien, on y trouveroit encore des bergers de l’Astrée[3]. M. de Saint-Hérem, M. de la Fayette, l’abbé Dorat[4], Plancy[5] et d’autres encore, suivoient dans un second carrosse, ou à cheval. Je fus reçue avec une grande joie. Mme de Brissac me mena souper chez elle ; je crois avoir déjà vu que le chanoine en a jusque-là de la duchesse : vous voyez bien où je mets la main. Je me suis reposée aujourd’hui, et demain je commencerai à boire. M. de Saint-Hérem m’est venu prendre ce matin

  1. Lettre 539 (revue en très-grande partie sur une ancienne copie). — On montre à Vichy, comme ayant servi d’habitation à Mme de Sévigné, un pavillon situé à l’une des extrémités du vieux Vichy, non loin de la source des Célestins. On voit des fenêtres le cours de l’Allier et plus loin de petites montagnes.
  2. Mme de Longueval, chanoinesse.
  3. Du fameux roman pastoral d’Honoré d’Urfé, qui commença à paraître en 1610, et dont les personnages sont, comme l’on sait, les bergers du Lignon.
  4. Serait-ce Jean-Jacques Dorat, docteur de Sorbonne, abbé de Saint-Germain et curé de Massy, qui mourut en 1677 ?
  5. Henri de Guénégaud, marquis de Plancy, troisième fils de Mme du Plessis Guénégaud, alors le seul survivant avec Emmanuel de Guénégaud, chevalier de Malte, qui devint maréchal de camp, fut dangereusement blessé à Hochstedt et mourut en 1706. Quant à Henri, né en 1647, il mourut en 1722, « après avoir servi, et fort ennuyé le monde, » dit Saint-Simon (tome XIX, p. 324). Il épousa en 1707 Anne-Marie-Françoise, comtesse de Mérode, morte en 1723 dans sa quarante-troisième année.