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Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 4.djvu/491

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1676prendre des cartes, rien ne m’endort plus sûrement. Si je veux être éveillée, comme on l’ordonne, je n’ai qu’à penser à vous, à vous écrire, à causer avec vous des nouvelles de Vichy : voilà le moyen de m’ôter toute sorte d’assoupissement. J’ai trouvé ce matin à la fontaine un bon capucin : il m’a humblement saluée ; j’ai fait la révérence aussi de mon côté, car j’honore la livrée qu’il porte. Il a commencé par me parler de la Provence, de vous, et de M. de Roquesante, de m’avoir vue à Aix, de la douleur que vous aviez eue de ma maladie. Je voudrois que vous eussiez vu ce que m’est devenu ce bon père dès le moment qu’il m’a paru si bien instruit : je crois que vous ne l’avez jamais vu, ni remarqué ; mais c’est assez de vous avoir nommée. Ce médecin que je tiens ici pour causer avec moi ne se pouvoit lasser de voir comme naturellement je m’étois attachée à ce père. Je l’ai assuré que s’il alloit en Provence, et qu’il vous fît dire qu’il a toujours été avec moi à Vichy, il seroit pour le moins aussi bien reçu. Il m’a paru qu’il mouroit d’envie de partir pour vous aller dire des nouvelles de ma santé : hors mes mains, elle est parfaite[1]; et je suis assurée que vous auriez quelque joie de me voir et de m’embrasser en l’état où je suis, après avoir su celui où j’ai été. Nous verrons si vous continuerez toujours à vous passer de ceux que vous aimez, ou si vous voudrez bien leur donner la joie de vous voir : c’est là que d’Hacqueville et moi vous attendons.

La bonne Péquigny est survenue à la fontaine : c’est une machine étrange ; elle veut faire tout comme moi, afin de se porter comme moi. Les médecins d’ici lui

  1. LETTRE 547 (revue presque entièrement sur une ancienne copie). —. Le manuscrit porte : « elle est dans la parfaite ; » ne faut-il pas lire : « je suis dans la parfaite ? »