Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/279

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déjà trop de m’avoir dit que vous ne valiez rien pour moi[1] ? quel discours ! ah ! qu’est-ce qui m’est donc bon ? et à quoi puis-je être bonne sans vous ?

Bonjour, Monsieur le Comte.


1677

637. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME ET À MONSIEUR DE GRIGNAN.

À Paris, dimanche au soir 15e août.

Je n’eusse jamais cru, ma chère fille, qu’un jour visé de si loin pût être tiré si juste : le voilà pourtant ce seizième que nous avons suivi depuis deux mois. Je pars demain à la pointe du jour avec le bon abbé : nous ne sommes pas bien réjouis ; mais on porte des livres ; et comme nous n’irons pas si vite que la diligence, nous pourrons rêver aux pauvres personnes que nous aimons.

Il y eut hier une fausse nouvelle répandue, que le siége de Charleroi étoit levé : tout le monde le prend pour un augure, tant on a mauvaise opinion de nos ennemis ; cette pensée m’est bonne, afin de ne pas emporter avec moi l’inquiétude d’une bataille. Mon fils a déjà écrit deux fois ; son pied s’est trouvé fort mal de l’agitation de la chaise[2]. Vous me proposez une belle-fille dont la santé pourroit résister à de plus grandes fatigues ; elle ressemble tout à fait à la belle Dulcinée. Je crois que nous ne pourrons[3] atteindre qu’à cette sorte de partis ; tous les autres nous fuient ; je vois dans les astres que nous ne sommes point heureux.

  1. 15. Voyez la lettre précédente, p. 269.
  2. Lettre 637. — 1. Voyez plus haut, p. 262. Il y a mal, au lieu de fort mal, dans l’édition de 1754.
  3. 2. Dans l’édition de 1754 : « pouvons. »