Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/109

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1679 plaisants dans cette disgrâce. Je disois que cela me faisoit souvenir de Soyecourt : Est-ce que je parle à toi[1]? Mlle[2] de Méri se réveilla de son épuisement, pour dire une chose bien plus plaisante; c’est la chanson de la Bourdeaux[3] qui tombe sur la Romère. Le monde, chère Agnès, est en vérité une étrange chose[4]. Lisez la fable des Animaux[5] :


Sa peccadille fut trouvée un cas pendable,

et le reste. Vous entendez fort bien tout ce que je dis et ne dis point. Enfin il en faut revenir à la Providence, dont M. de Pompone est adorateur et disciple; et le moyen de vivre sans cette divine doctrine? Il faudroit se pendre vingt fois le jour; et encore avec tout cela on a bien de la peine à s’en empêcher. En attendant vos lettres, ma très-chère, je n’ai pu m’empêcher de causer un peu avec vous sur un sujet que je suis assurée qui vous tient à cœur[6].

  1. 12. M. de Soyecourt (dans notre ancienne copie, le nom est écrit, comme on le prononçait: « Saucourt ») étant couché dans la même chambre avec trois de ses amis, la fantaisie lui prit de parler fort haut pendant la nuit à l’un d’entre eux; un autre, impatienté, s’écrie: « Eh, morbleu! tais-toi, tu m’empêches de dormir. » M. de Soyecourt lui dit: «Est-ce que je parle à toi?» Ce conte parut si plaisant à Mme de Sévigné, qu’elle en fit depuis de fréquentes applications dans ses lettres. (Note de Perrin, à la lettre du 9 juin 1680.)
  2. 13. Ce passage, jusqu'à: «et le reste,» ne se trouve que dans notre ancienne copie.
  3. 14. Voyez tome II, p. 471, note 10. - Il y a des couplets satiriques du temps sur la liaison de ces deux femmes.
  4. 15. Voyez l’École des Femmes de Molière, acte II, scène vi.
  5. 16. Les Animaux malades de la peste, fable i du livre VII. Mme de Sévigné a substitué jugée à trouvée.
  6. 17. «Ma chère fille, en attendant vos lettres, je n’ai pu m’empécher de causer un peu avec vous sur ce sujet, etc.» (Édition de 1734.) - A la fin de la phrase, «à cœur» est le texte de notre ancienne copie; les deux éditions de Perrin donnent « au cœur. »