croire ce qui devroit être. Pour Monsieur le chevalier, vous ne sauriez me surprendre en me parlant de son amitié et de sa bonté ; cela est admirable, c’est donc lui qui vous veut donner de quoi le payer : le tour est rare ; mais la difficulté, c’est de trouver l’argent, quoique l’hypothèque soit bonne. Pourquoi M. de la Garde ne vous feroit-il point trouver cette somme si médiocre ? Ma chère enfant, j’en veux à tout le monde : je trouve que l’on ne fait point son devoir. Plùt à Dieu avoir encore quelque petite somme portative ! il me semble que je vous l’aurois bientôt donnée ; mais je n’ai que de vilaines terres qui deviennent des pierres au lieu d’être du pain. Je ne suis donc bonne qu’à discourir, à trouver à redire à ce qui est mal, à vous plaindre, à sentir vivement vos douleurs[1], et du reste, hélas ! vous le voyez, et vous ne voyez rien, ni moi non plus. Je vous conjure, ma fille, de me dire la suite de tous ces chapitres si pressants et si importants : ne craignez point de m’affliger ; je suis encore plus affligée quand je le suis toute seule, et que je ne sais qu’en gros de quoi il est question. Vos assemblées ne durent plus[2] que quinze jours, et nos états trois semaines ; ils deviendront encore plus courts ; car il ne s’agit plus que du don gratuit[3]6. Monsieur d’Aix doit être bien content que Monsieur d’Arles lui quitte la place ; appelle-t-on cela de l’orgueil ? c’en est un au moins qui contente fort celui de Monsieur l’archevêque d’Aix : ces deux orgueils, dont l’un demeure, et l’autre s’en va, s’accommoderont fort bien ensemble. Si Monsieur d’Arles croit avoir attrapé Monsieur d’Aix, il est
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