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1273. DE MADAME DÉ SÉVIGNÉ A MADAME DE GRIGNAN, AU COMTE DE LA GARDE, AU COMTE DE GRIGNAN, ET A PAULINE.

Aux Rochers, dimanche 23è avril.

Réponse au 13è.

A MADAME DE GRIGNAN.

Vous les recevez donc toujours, ma bonne, avec cette joie et cette tendresse qui vous fait croire que saint Augustin et M. du Bois y trouveroient à retrancher ; ce sont vos chères bonnes, elles sont nécessaires à votre repos ; il ne tient qu’à vous de croire que cet attachement est une dépravation cependant vous vous tenez dans la possession de m’aimer de tout votre cœur, et bien plus que votre prochain, que vous n’aimez que comme vous-même. Voilà bien de quoi !

Voilà, ma chère bonne, ce que vous me dites. Si vous pensez que ces paroles passent superficiellement dans mon cœur, vous vous trompez je les sens vivement, elles s’y établissent, je me les dis et les redis, et même je prends plaisir à vous les redire, comme pour renouveler vos vœux et vos engagements. Les personnes sincères comme vous donnent un grand poids à leurs paroles. Je vis donc heureuse et contente sur la foi des vôtres. En vérité, elle est trop grande et trop sensible, cette amitié : il me semble que par un esprit de justice, je serois obligée d’en retrancher car la tendresse des mères n’est pas ordinairement la règle de celle des filles; mais vous n’êtes point aussi comme les autres : ainsi je jouirai sans scrupule de tous les biens que vous me faites; je solliciterai même M. du Bois pour ne point troubler une si douce possession.

Parlons de votre santé, voilà le temps que votre sang se met en colère. Vous en étiez il y a un an fort incom-



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