Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/51

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Pontorson vous en souvient-il ? Nous avons été sur le rivage longtemps, à toujours voir ce mont, et moi à 1 songer toujours à ma chère fille. Enfin nous arrivâmes ici, où je défie la mort d’attraper l’évêque[1] Nous y avons trouvé un garde de M. de Chaulnes, qui est occupé à recevoir toutes ces troupes qui viennent de tous côtés. C’est une chose pitoyable que l’étonnement et la douleur des Bretons, qui n’en avoient point vu depuis les guerres du comte de Montfort et du comte de Blois[2] : ce sont des larmes et des désolations. Nous nous reposons aujourd’hui. Mon fils est à Rennes avec sa femme je logerai chez la bonne Marbeuf, quoiqu’elle ne soit pas trop bien avec ce duc et cette duchesse, parce qu’elle est toute dévouée à M. de Pontchartrain[3]mais il faut souffrir ce petit chagrin ; j’irai toujours mon chemin; je ne suis mal avec personne. C’est pour causer, ma chère enfant, que

Elle fléchit pour vous son invincible orgueil;

Et sentant sur sa croupe une charge si belle,

Elle vous caressa par un muet accueil;

Puis de votre départ voyant l’heure cruelle,

Pans ses concavités elle en pleura de deuil;

Elle ne le dit pas: je vous le dis pour elle.

(Note de l’édition de 1818.)

  1. 8. Mathieu Thoreau, évéque de Dol de 1660 au 31 janvier 1692.
  2. 9. C'est-à-dire depuis la guerre de la sucessio de Bretagne, au quatorzième siècle entre les comtes Charles de Blois et Jean de Montfort
  3. 10. Il avait été premier président du parlement de Bretagne et était alors un des trois intendants des finances, ayant, comme tel, la Bretagne dans son département : voyez l’Etat de la France de 1689, tome II, p.279. Voyez aussi tome VII, p. 15, note 1, et ci-après, la lettre du 5 juin 1689, p. 68, note 10.