Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/511

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core a 1'extrémité, poussant son bon esprit au delà de l’agonie. Le Roi lui envoya faire une amitié, et[1] qu’il étoit faché de l’état où il étoit. Il répondit avec un ton et un courage de philosophe, qu’il remercioit Sa Majesté, qu’il mourroit son serviteur, et que s’il ne l’avoit pas servi utilement, il avoit au moins servi longuement et fidèlement. C’est une perte pourtant qu’un tel mérite quand on a les qualités principales, il faut passer les gens pour bons, dans la difficulté de trouver des hommes parfaits ; et puis il faut mourir c’est la fin des plus belles vies du monde[2]. Celle de M. de Lorraine étoit du nombre.[3] Je demande en grâce à l’étoile du Roi de nous ôter encore le prince d’Orange ; et puis nous la [4] laisserons en paix; mais celle-là[5] nous est nécessaire. J’eusse bien voulu

  1. 6. Dans la première édition (1827) on a ajouté dire devant qu’il. "Ce mot n’est pas absolument nécessaire; nous avons déjà vu de semblables ellipses.
  2. 7. « Messire Charles de Sainte-Maure duc de Montausier mourut en cette ville (à Paris) le 17 de ce mois, après une longue maladie,, dans laquelle il a fait paroitre, jusqu’à l’extrémité, la grandeur d’âme et toutes les vertus chrétiennes qui lui aboient attiré l’estime et la vénération du public. Il étoit né le 6e d’octobre l6à. » (Gazette du 20 mai 1690.)
  3. 8. Le duc Charles de Lorraine était mort à Welz, près de Lintz, le 18 avril. Se voyant près de sa fin, il avait écrit à l’Empereur « Sacrée Majesté, suivant vos ordres, je suis parti d’Inspruck pour me rendre à Vienne mais je suis arrêté ici par un plus grand maître : je vais lui rendre compte d’une vie que je vous avois consacrée tout entière. Souvenez-vous que je laisse une épouse qui vous touche, des enfants à qui je ne laisse que mon épée, et des sujets qui sont dans l’oppression. » En apprenant cette mort, Louis XIV s’était écrié « J’ai perdu le plus grand, le plus sage et le plus généreux de mes ennemis. Voyez la Gazette du 13 mai, p. 218, et l’Histoire de là réunion de la Lorraine à la France, par M. le comte d’Haussonville, tome III, p. 386. et 387. ̃
  4. 9. Il y a le dans le manuscrit. Le prince d’Orange, Guillaume III, ne mourut que douze ans plus tard, en 1702.
  5. 10. « Mais celle-là, » c’est-à-dire, comme ou a imprimé dans l’édi-