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Page:Sacher-Masoch - La Femme séparée, 1881.djvu/225

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LA FEMME SÉPARÉE

compagnie pendant les matinées et les après-midi où Julian était occupé au dehors. Elle s’établit bientôt tout à fait chez moi.

Ce qui m’amusait beaucoup aussi, c’étaient mes séances chez le peintre. Les sincères compliments du grand artiste me faisaient plaisir.

Le portrait fut réussi et obtint un succès énorme. Prinzhofer eut tous les honneurs de l’exposition. Vous jugez si les autres femmes furent jalouses ! Elles me le montrèrent bien. Une pensée aussi m’aiguillonnait depuis quelques jours. Ma position ne me paraissait pas bien nette. Je me disais qu’à tout prendre je n’étais maintenant que la maîtresse de Julian, et que si le monde me considérait comme telle, il n’avait pas tort.

Du reste, l’idée que Julian travaillait comme un nègre pour m’aider à vivre me faisait rougir. Je résolus d’entreprendre quelque chose, de chercher à subvenir moi-même à mon existence. Je me rappelai que j’avais fait de la peinture avant mon mariage et que j’avais obtenu les plus grands éloges. Je retrouvai chez mon père, au grenier, mon chevalet et mon appui-main. J’achetai les outils qui me manquaient, et je me rendis chaque jour au musée pour y étudier. Je peignis la copie d’un tableau hollandais, genre Callot.

Cela me réussit si bien, que l’artiste qui avait ex-