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LA PANTOUFLE DE SAPHO

Se retournant, elle vit la main décharnée de la vieille lui tendant le rôle qu’elle avait laissé glisser de son manchon.

Sophie Schrœder, surprise, considéra la pauvre femme.

— Qu’avez-vous ? lui dit-elle de sa merveilleuse voix, vous paraissez bien pauvre et malheureuse. Pourquoi me cachez-vous votre visage comme s’il m’était connu ?

La vieille femme étouffa un sanglot et voulut s’éloigner. La Schrœder, de son bras robuste, la retint et, doucement, écarta le fichu.

— Mon Dieu, balbutia-t-elle en découvrant le visage défait, c’est vous, ma chère Muller ? Vous, dans cette situation ? Dois-je trouver la belle artiste, aux pieds de qui se prosternaient les comtes et les princes, réduite… à mendier !

— Je n’ai pas mendié, murmura la vieille, tandis que des larmes brûlantes coulaient le long de ses joues émaciées. Je suis seulement restée debout dans ce coin.

» C’est la première fois, j’avais si affreusement faim, mais personne ne m’a rien donné et je mourrais plutôt que de recommencer.