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Page:Sacher-Masoch - Les Prussiens d’aujourd’hui, 1877.djvu/70

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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

Des dames, des messieurs élégants remplissent les stalles. Les ouvreuses s’empressent de çà de là. Cependant les loges sont encore vides pour la plupart, quoique les flammes de la rampe s’élèvent du dessous de la scène et que le chef de musique soit à son poste.

Madame Rosenzweig, une forte femme qui a la respiration difficile et qui transpire à quinze degrés de froid, Micheline et Hanna, se montrent dans une loge de premier rang.

Aussitôt après elles, la comtesse Bärnburg arrive dans une loge de parterre en toilette inouïe. Wolfgang et le jeune dieu en hussard, qui sont appuyés au-dessous de la loge, se mesurent de l’œil en ennemis.

Le souffleur a déposé sa tabatière et son mouchoir bleu près de son pupitre ; le chef d’orchestre vient de jeter un coup d’œil à ses musiciens ; l’ouverture commence et la comtesse soupire.

— Chaque fois qu’on donne une tragédie, on entend cette même fade musique, dit-elle à sa voisine, la femme du ministre de Kronstein.

Si elle savait que la musique du moment est un andante de Beethoven, elle serait enchantée.

L’orchestre s’est tu ; la toile se lève, découvrant un site champêtre. À droite, une madone dans sa niche ; à gauche, un grand chêne ;