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UNE FAMILLE COMME IL Y EN A PEU

ment madame Andor parvenait-elle à ce résultat ? C’était une énigme pour chacun ; mais le fait parlait et l’invitation était toujours si cordiale ! Avec son sourire, madame Andor vous eût fait croire que les cuillers en grès étaient en argent ; et, avec cinq pains et deux poissons, elle eût nourri cinq mille personnes.

Quand un visiteur venait, il trouvait Andor assis dans la grande chambre du premier étage, servant à la fois de salon, de salle à manger, de serre chaude et de ménagerie.

Dans cette chambre, on voyait d’abord un vieux meuble de salon en étoffe rouge usée, à grosses fleurs blanches, puis une longue table entourée d’une demi-douzaine de siéges en canne, puis deux fenêtres remplies de fleurs, avec du lierre en treillis. À chacune de ces fenêtres, un haut rosier sauvage partait d’un vase en grès blanc, avec de petits amours, pour monter jusqu’au plafond, sur une croix de bois, et de vrais arbres verts répandaient un faible et doux parfum. Les murs étaient cachés par de grandes armoires remplies de livres, par de jolies vieilles estampes, et partout on entendait chanter, gazouiller, vivre.

Sur le poêle, un gros chat gris ronronne d’un air songeur. Du buffet où elles ont fait leur nid, dans la corbeille de fleurs d’une Flore en plâtre,