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LA MÈRE DE DIEU.

« Ici, à mes pieds, lui dit-elle, et écoute ce que je vais te dire. »

Sabadil se jeta à ses genoux et se mit à pleurer amèrement.

« Mardona ! s’écria-t-il, ne vois-tu pas que l’amour et la jalousie me consument ? »

Il cacha son visage sur les genoux de Mardona, Elle lui passa la main dans les boucles de sa chevelure, doucement, avec tendresse. Elle souriait en se penchant sur lui. Et elle commença à lui parler longuement, à lui enseigner la foi, la résignation et le pardon.

« Rappelle-toi ce que je t’ai déjà enseigné, dit-elle, c’est l’amour de la Mère de Dieu qui apporte la rédemption. Il constitue pour l’homme une nouvelle naissance : car ce qui est né de la chair est chair, et ce qui vient de l’esprit est esprit. Tous doivent m’aimer, et mon cœur doit être accessible à tous, — spirituellement, bien entendu. Il m’est interdit de connaître l’amour terrestre.

— Pourquoi me dis-tu cela ? demanda Sabadil très découragé.

— Pour que tu te souviennes que je n’ai rien de commun avec les autres femmes. Je suis à la place de Dieu. L’amour que l’on me témoigne, c’est un culte.

— Je le sais, dit Sabadil d’un air sombre, mais, vois-tu, je souffre comme un martyr sur un gril ardent. »

Mardona eut un doux sourire.

« Satan est en toi, murmura-t-elle. Efforce-toi de le vaincre. Prie et jeûne. »

Anuschka entra, annonçant que deux paysans de