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LA MÈRE DE DIEU.

— Non, certes. Elle n’a pas de cœur… »

Le lendemain, Nimfodora se tenait devant sa porte, à Brebaki, causant avec Anuschka, lorsque Sukalou vint à passer. Il s’arrêta, huma une prise de tabac, et cligna finement de l’œil en regardant Nimfodora d’un air narquois.

« Eh bien, commença-t-il, à quand les noces, jeune fille ?

— Que veut-il dire ? demanda Anuschka.

— Je ne sais pas, répondit Nimfodora à voix basse.

— Mais vous m’y inviterez au moins », s’écria Sukalou, et il reprit sa route en souriant.

Anuschka retourna chez elle.

« Est-il vrai que Nimfodora se marie prochainement ? demanda-t-elle à Mardona. Qui donc épouse-t-elle ?

— On s’est moqué de toi pour sûr, repartit la Mère de Dieu d’un ton glacial.

— C’est Sukalou qui l’a dit. »

Par malheur, Sukalou passa justement près de la métairie une heure plus tard. Mardona, qui se tenait près de la fenêtre, absorbée dans de douloureuses réflexions, l’aperçut de loin. Elle appela ses frères et leur ordonna d’aller lui chercher Sukalou. Lorsque celui-ci longea la haie qui entourait la métairie, en regardant prudemment autour de lui, Turib et Jehorig l’assaillirent et l’entraînèrent dans la maison.

« Que voulez-vous ? Laissez-moi ! cria Sukalou, en se débattant de toutes ses forces, jusqu’à ce que la porte se fût refermée derrière lui et qu’il eût aperçu Mardona assise sur son siège.