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LA MÈRE DE DIEU.

« Je ne te force pas, dit-elle doucement. Un mot de ta bouche, et je te rends la liberté. Veux-tu supporter la punition que je t’inflige, oui ou non ? »

Elle se pencha vers lui tendrement.

« Je supporterai tout ce que tu ordonneras, Mardona ; seulement, tu me pardonneras, dis ?

— Je te pardonne déjà maintenant », repartit-elle avec bonté.

Barabasch rentra suivi de deux hommes qui portaient la croix. Ils la couchèrent par terre, au milieu du temple. Kenulla tenait des cordes.

« Es-tu prêt ? demanda Mardona à sa victime.

— Oui », répondit Sabadil.

Elle se courba vers lui et l’embrassa ; après elle, vinrent les assistants, qui lui donnèrent aussi le baiser de paix. Puis l’assemblée entonna en chœur un cantique. Barabasch et ses compagnons saisirent Sabadil, défirent les liens qui le garrottaient, l’étendirent sur la croix et l’y attachèrent, par les pieds et par les mains, avec de grosses cordes. Ils redressèrent ensuite la croix et l’appuyèrent à la muraille.

La foule demeura quelques moments encore dans le temple, murmurant des prières, glacée par ce spectacle inusité, et inquiète. Enfin tous sortirent et se dispersèrent.

Nimfodora, Sofia et Sukalou restèrent près de Sabadil. Mardona le leur avait ordonné. Barabasch montait la garde à la porte de la métairie, où l’on avait fermé et barricadé toutes les issues. Personne ne devait entrer jusqu’au prochain lever du soleil.

Une heure s’écoula. Mardona sortit de nouveau dans