Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 1, 1795.djvu/330

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jours voler au-devant de toutes les infortunes pour s’en composer des supplices. On dirait qu’elle aime à s’en nourrir, et que cette manière d’exister comme plus vive, devient celle qui lui va le mieux. Que vous importe cette fille que vous n’avez jamais connue ? c’est bien assez de pleurer sur des maux réels, sans regretter les plaisirs qu’on n’a pu prendre. Avec cette façon de penser, on se ferait des peines de tout, et l’on se rendrait fort malheureux. Sans doute notre amour pour nos enfans doit être en raison du leur pour nous ; il me paraîtrait tout aussi déplacé d’aimer un enfant qui nous haïrait, qu’il est fou, (pardonnez-moi l’expression,) d’en aimer un que nous ne devons jamais voir. L’amour suppose des rapports, et quels sont ceux qui peuvent exister entre nous et un être inconnu ? Peut-être trouverez-vous mes moyens de consolation un peu durs ; mais il faut impitoyablement enlever à un cœur aussi sensible que le vôtre, la facilité perpétuelle qu’il a de s’affliger ; retrouvez dans le sein de votre Aline…; de