Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/266

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jusqu’à la trace ; et m’ayant fait embarquer sur un grand bâtiment qu’il avait fait construire d’après ses desseins, dans la seule vue de ce voyage ; il m’embrassa et me dit les larmes aux yeux : « Ô toi que je ne reverrai peut-être jamais, toi que je sacrifie au bonheur de la Nation qui m’adopte, va connaître l’univers, mon fils, va prendre chez tous les peuples de la terre ce qui te paraîtra le plus avantageux à la félicité du tien. Fais comme l’abeille, cours sur toutes les fleurs, et ne rapporte chez toi que le miel : tu vas trouver parmi les hommes beaucoup de folie avec un peu de sagesse, quelques bons principes mêlés à d’affreuses absurdités…… Instruis-toi, apprends à connaître tes semblables avant d’oser les gouverner…… Que la pourpre des Rois ne t’éblouisse point, démêle-les sous la pompe où se dérobent leur médiocrité, leur despotisme et leur indolence. Mon ami, j’ai toujours détesté les rois, et ce n’est pas un trône que je te destine, je veux que tu sois le père, l’ami de la Nation qui nous adopte ;