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HISTORIETTES, CONTES ET FABLIAUX


autres, mon cher marquis, nous sommes des opérateurs. — Dites mieux, président, dites mieux, répliqua d’Olincourt qui commençait à s’échauffer, dites que vous êtes des exécuteurs, d’insignes bourreaux qui, naturellement ennemis de l’État, n’avez de délices qu’à vous opposer à sa prospérité, qu’à placer des entraves à son bonheur, qu’à flétrir sa gloire et qu’à faire couler sans raison le sang précieux de ses sujets. Malgré les deux bains d’eau froide qu’avait pris Fontanis dans sa journée, la bile est une chose si difficile à détruire dans un homme de robe que le pauvre président frémissait de rage d’entendre dénigrer ainsi un métier qu’il croyait aussi respectable : il ne concevait pas que ce qu’on appelle la magistrature fût dans le cas d’être bâtonné de la sorte, et peut-être allait-il répliquer en matelot marseillais, lorsque les dames s’approchèrent et proposèrent de s’en retourner. La marquise demanda au président si quelque nouveau besoin ne l’appelait pas au cabinet secret. — Non, non, madame, dit le marquis, ce respectable magistrat n’a pas toujours la colique, il faut lui pardonner s’il en a vu l’attaque un peu sérieusement ; c’est une maladie conséquente à Marseille ou à Aix, qu’un petit mouvement d’entrailles, et depuis que nous avons vu une troupe de coquins, con-