tournée vers ſon bourreau, de ſuperbes cheveux ;
en déſordre, & des pleurs inondant le plus beau
viſage du monde… le plus doux… le plus intéreſſant.
Rodin conſidére ce tableau, il s’en embrâſe,
il place un bandeau ſur ces yeux qui l’implorent,
ſa bouche s’en approche, il n’oſe les baiſer,
Julie ne voit plus rien, Rodin plus à l’aiſe
détache les voiles de la pudeur, la chemiſe retrouſſée
ſous le corſet ſe releve juſqu’au milieu
des reins… Que de blancheur, que de beautés !
ce ſont des roſes effeuillées ſur des lis, par la
main même des graces. Quel eſt-il donc l’être aſſez
dur pour condamner aux tourmens des appas ſi
frais… ſi piquans ? Quel monſtre peut chercher le
plaiſir au ſein des larmes & de la douleur ! Rodin
contemple… ſon œil égaré parcourt, ſes mains
oſent profaner les fleurs que ſes cruautés vont flétrir ;
parfaitement en face, aucun mouvement ne
peut nous échapper, tantôt le libertin entr’ouvre,
& tantôt il reſſerre ces attraits mignons qui l’enchantent ;
il nous les offre ſous toutes les formes,
mais c’eſt à ceux-là ſeuls qu’il s’en tient. Quoique
le vrai temple de l’Amour ſoit à ſa portée, Rodin
fidele à ſon culte, n’y jette pas même de regards,
il en craint juſqu’aux apparences ; ſi l’attitude les
expoſe, il les déguiſe ; le plus léger écart troublerait
ſon hommage, il ne veut pas que rien le
diſtraie… Enfin ſa fureur n’a plus de bornes, il
l’exprime d’abord par des invectives, il accable
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