Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/216

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nets où les Moines paſſent quand ils veulent iſoler leurs plaiſirs & les goûter avec nous, hors des yeux de leurs confrères ; les entreſols compoſent huit chambres, dont quatre ont un cabinet ; ce ſont les cellules où les Moines couchent & nous introduiſent, quand leur lubricité nous deſtine à partager leurs lits ; les quatre autres chambres ſont celles des freres ſervans, dont l’un eſt notre geolier, le ſecond le valet des Moines, le troiſieme le chirurgien, ayant dans ſa cellule tout ce qu’il faut pour des beſoins preſſans, & le quatrieme le cuiſinier ; ces quatre freres ſont ſourds & muets ; difficilement on attendrait donc d’eux, comme tu vois, quelques conſolations ou quelques ſecours ; ils ne s’arrêtent jamais d’ailleurs avec nous, & il nous eſt très-défendu de leur parler. Le deſſus de ces entreſols forme les deux ſérails ; ils ſe reſſemblent parfaitement l’un & l’autre : c’eſt, comme tu vois, une grande chambre où tiennent huit cabinets ; ainſi tu conçois, chere fille, qu’à ſuppoſer que l’on rompît les barreaux de nos croiſées, & que l’on deſcendît par la fenêtre, on ſerait encore loin de pouvoir s’évader, puiſqu’il reſterait à franchir cinq haies vives, une forte muraille, & un large foſſé : ces obſtacles fuſſent-ils même vaincus où retomberait-on, d’ailleurs ? Dans la cour du Couvent qui, ſoigneuſement fermée elle-même, n’offrirait pas encore dès le premier moment une ſortie bien ſûre. Un moyen d’évaſion