Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/304

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tourmens de l’inquiétude ſe réveillerent dans mon cœur. — Il faut que je ſache comme vous êtes faite, continua le Comte, en me fixant d’un air qui me fit trembler : il ne faut aucun défaut corporel pour la place que vous avez à remplir ; montrez donc tout ce que vous portez. Je me défendis ; mais le Comte diſpoſant à la colère tous les muſcles de ſon effrayante figure, m’annonce durement qu’il ne me conſeille pas de jouer la prude avec lui, parce qu’il a des moyens ſûrs de mettre les femmes à la raiſon. Ce que vous m’avez raconté, me dit-il, n’annonce pas une très-haute vertu, ainsi vos réſiſtances ſeraient aussi déplacées que ridicules.

À ces mots, il fait un ſigne à ſes jeunes garçons, qui, s’approchant auſſitôt de moi, travaillent à me déshabiller. Avec des individus auſſi faibles, auſſi énervés que ceux qui m’entourent, la défenſe n’eſt pas aſſurément difficile ; mais de quoi ſervira-t-elle ? L’Antropophage qui me les lançait, m’aurait, s’il eût voulu, pulvériſée d’un coup de poing. Je compris donc qu’il fallait céder : je fus déshabillée en un inſtant, à peine cela eſt-il fait, que je m’apperçois que j’excite encore plus les ris de ces deux Ganimèdes. Mon ami, diſoit le plus jeune à l’autre, la belle chose qu’une fille… Mais quel dommage que ça ſoit vide-là. — Oh ! diſoit l’autre, il n’y a rien de plus infâme que ce vide, je ne toucherais pas une femme quand il