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LA MARQUISE DE GANGE

beaux yeux, fixés sur lui, semblaient solliciter une meilleure réponse. — Impossibles ? dit Euphrasie. — Oui, ma sœur, impossibles. Vous êtes innocente, dites-vous, et c’est en raison de cela que naît en votre âme le désir de vous remettre bien avec mon frère. Ce raisonnement est spécieux sans doute ; mais si vous êtes coupable, ce que votre époux et moi sommes très fondés à croire, comment voulez-vous que je me charge de cette négociation ? — Et pourquoi détruisez-vous mon désir par une supposition gratuite ? — Tel est précisément le comble de fausseté que votre mari ne vous pardonnera jamais. Il aimerait mieux cent fois l’aveu de vos fautes, et la demande du pardon, que cette coupable impudence dans le crime. — On ne persuade la culpabilité que par des preuves : où sont les vôtres ? — Je les possède ; c’est à moi que Villefranche confia ses amours, sans se rendre à tout ce que je fis pour l’en détourner ; à moi qu’il prouva l’empire qu’il avait acquis sur vous. Ne revenons pas, si vous le voulez, sur l’acte passé chez Deschamps dans le cours de ce voyage, quoiqu’il ne fallût qu’une telle pièce pour vous perdre. Tenons-nous-en, je le veux bien, à l’aventure de Villefranche : que signifie son retour ici, cette promenade au labyrinthe, ce rendez-vous donné là, et dont la preuve existe dans un billet signé de vous, et trouvé dans la poche du mort ?