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LA MARQUISE DE GANGE

entré dans cette retraite ; je vais perdre tout ce que j’ai de plus cher au monde et, resté seul auprès de leurs cendres, je n’aurai plus sous les yeux que mon crime.

Ici les cris aigus de l’enfant se confondirent avec les plaintes touchantes de la mère et les gémissements altérés du vieillard.

La marquise était offensée, sans doute, elle l’était cruellement par l’homme qui osait l’implorer ; mais, dans une âme comme la sienne, le ressentiment se brise où le malheur se fait entendre.

— Mon ami, dit-elle à Deschamps, vous m’avez fait tout le mal que vous pouviez me faire ; mais ce que vous m’offrez m’en fait encore davantage. Vous n’avez qu’essayé le malheur sur moi… Je le vois tout entier sur vous : je vous pardonne. Je n’ai que trente louis dans cette bourse… les voilà. Soulagez votre famille ; redevenez sage ; c’est à l’école de l’infortune que l’homme apprend à l’être. Ne cherchez que des remords dans l’intervalle qui vous reste jusqu’aux portes du tombeau, et vous serez digne d’y descendre quand vous n’aurez plus de larmes à répandre sur la carrière de la vie.

— Ah ! madame, dit avec l’élan sublime de la reconnaissance l’homme qu’Euphrasie vient de sauver, ne me quittez pas, je vous en conjure, avant que je vous aie nommé les instigateurs de