Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/110

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a tout plein de filles qui ont joui dix ans de cette façon, et même avec plusieurs hommes, et qui ne se sont pas moins mariées comme toutes neuves après. Que de pères, que de frères ont ainsi abusé de leurs filles, de leurs sœurs, sans que celles-ci en soient devenues moins dignes de sacrifier ensuite à l’hymen ! À combien de confesseurs cette même route n’a-t-elle pas servi, sans que les parens s’en doutassent ? C’est, en un mot, l’asyle du mystère ; c’est-là qu’il s’enchaîne aux amours par les liens de la sagesse. Faut-il vous dire plus, Justine, si ce temple est le plus secret, il est en même-tems le plus délicieux ; on ne trouve que là ce qu’il faut au bonheur ; et cette vaste aisance du voisin est bien éloignée de valoir les attraits piquans d’un local ou l’on ne pénètre qu’avec effort, où l’on n’est logé qu’avec peine, où l’on ne jouit qu’avec délices ; les femmes même y gagnent, et celles que la raison contraignit à ne frayer que cette route ne regrettèrent jamais l’autre. Essayez, Justine, essayez ; livrez-moi votre divin petit cul, et nous serons tous deux contens.

Monsieur, répondit Justine, en se soustrayant de son mieux aux entreprises de ce libertin d’autant plus dangereux, qu’il réunis-