Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/139

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se combiner, s’observer, que d’après des données mécaniques, toujours suffisantes à en découvrir les mystères. Oh ! monsieur, dit Justine, ces systêmes sont épouvantables. — Oui, pour vous, qui craignez d’en devenir la victime, jamais pour moi qui suis le sacrificateur. — Et, si la chance tourne ? — Alors je me soumettrai, sans changer d’opinion, et la philosophie me consolera, parce qu’elle m’assure un néant éternel, et que je le préfère à l’incertitude des peines ou des récompenses que vos religions me proposent ; les premières me révoltent, elles me font horreur ; les secondes ne me touchent point ; il n’y a aucune espèce de proportion entre ces peines et ces récompenses ; de ce moment elles sont ridicules ; et s’il est certain qu’elles soient telles, elles ne peuvent plus dès-lors être l’ouvrage d’un Dieu. À l’exemple de quelques docteurs, ne pouvant concilier les tourmens physiques de l’enfer avec la bienfaisance de leur Dieu, me direz-vous que mon unique tourment sera d’être privé de sa vue ; et que m’importe ? Pourrai-je jamais être puni de ne point voir ce dont je n’ai nulle idée ? Mais il se présentera un moment à mes yeux pour me faire sentir tout le prix de sa perte ; en ce cas elle