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que leurs motifs ne sont pas puisés dans l’égoïsme, la plus puissante et la plus légitime de toutes les excuses ; la seconde, parce qu’elles agissent toujours de sang-froid et de leur propre gré, au lieu que le meurtrier est toujours entraîné par ses passions… toujours l’aveugle instrument des volontés d’une nature qui le fait agir malgré lui ; d’où il résulte que le spectacle de l’exécution d’un criminel n’offre à l’œil philosophique qui l’observe, que le crime, où les sots respectent la loi ; et dans l’autre cas, que la justice, où ils n’apperçoivent que le forfait et l’infamie[1].

O Justine ! persuade-toi donc bien que la vie du plus sublime des hommes n’est pas à la nature d’une plus grande importance que celle d’une huître, et qu’elle nous est abandonnée tout de même. Si la nature s’était réservé le soin particulier de disposer de la vie des hommes, de manière que ce fut usur-

  1. Que font les loix en punissant l’infracteur du pacte social ? Elles vengent des intérêts particuliers. Si le crime qu’elles commettent alors en ma faveur est nul, celui que je commettrai dans les mêmes vues doit assurément l’être de même.