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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/27

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dont ma jeunesse et mes malheurs ont besoin, et vous voulez me les faire acheter trop chers. » le serviteur de christ, honteux d’être dévoilé, se lève en colère ; il appelle sa nièce et sa servante ; chassez-moi cette petite coquine, leur crie-t-il, vous n’imagineriez pas ce qu’elle vient de me proposer… Tant de vices à cet âge… et à un homme comme moi… qu’elle sorte… qu’elle sorte ou je la fais arrêter dans l’instant… Et la malheureuse Justine repoussée, calomniée, insultée dès le premier jour qu’elle est condamnée à l’isolisme, entre dans une maison où elle voit un écriteau, loue un petit cabinet garni au cinquième, le paie d’avance, et s’y livre à des larmes d’autant plus amères, qu’elle est naturellement très-sensible, et que sa fierté vient d’être cruellement compromise.

Justine n’était pas au bout de toutes les petites duretés que devaient lui faire sentir ses désastres ; il y a une infinité de scélérats dans le monde qui, loin de s’attendrir sur les malheurs d’une fille sage, ne cherchent qu’à les redoubler pour la mieux contraindre à servir des passions où son indigence la condamne. Mais de tous les désagrémens qu’elle eut à essuyer dans les commencemens de sa mal-