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tience, lorsque Rodin, las d’en avoir autant, se décide enfin à savoir ce qu’il doit attendre de sa nouvelle acquisition.

Il y avait environ quinze jours que notre héroïne était dans cette maison, lorsque Rodin, enflammé du desir que nous venons de peindre, se présente un matin chez elle. Après quelques instans de conversation générale, Rodin fit parler ses desirs. Peu accoutumé aux préliminaires d’un sentiment dont le coquin n’éprouve que le besoin physique, il saisit Justine à brasse-corps et veut la culbuter sur un lit ; laissez-moi, monsieur, dit cette vertueuse fille ; laissez-moi où j’appelle toute la maison en témoignage de l’horreur que vous vous proposez ; et à quel titre, je vous prie, prétendez-vous faire de moi la victime de votre brutalité ; est-ce parce que vous m’avez reçu chez vous ? Mais, je m’y rends utile, j’y gagne ma vie ; et quand je m’y conduis bien, j’y dois être à l’abri de vos insultes ; souvenez-vous qu’il ne sera jamais rien dans le monde qui puisse m’y soumettre ; ma reconnaissance vous est due, mais je ne l’acquitterai pas au prix de mon honneur.

Rodin, confondu d’une résistance à laquelle il ne s’attendait point avec une fille tellement