Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/32

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cette manie d’obliger gratuitement les autres ; on a reconnu que les plaisirs de la bienfaisance n’étaient que les voluptés de l’orgueil, et comme rien n’est aussi fragile, on a voulu des sensations plus réelles ; on a vu, qu’avec un enfant comme vous, par exemple, il valait infiniment mieux retirer pour fruit de ses avances, tous les plaisirs que peut offrir la luxure que ceux très-froids de la reconnaissance ; la réputation d’un homme libéral, aumônier, généreux, ne vaut, pas même à l’instant où l’on en jouit le mieux, le plus léger plaisir des sens. — Ah monsieur, avec de pareils principes, il faut donc que l’infortuné périsse ! — Qu’importe, il y a plus d’individus qu’il ne faut dans le monde ; pourvu que la machine ait toujours la même élasticité, que fait à l’état le plus ou le moins de bras qui la pressent ! — Mais croyez-vous que des enfans respectent leurs pères quand ils en sont maltraités ! — Que fait à un père l’amour des enfans qui le gênent ? — Il vaudrait donc mieux qu’on nous eût étouffé dès le berceau. — Assurément, c’est l’usage dans beaucoup de pays, c’était la coutume des Grecs, c’est celle des Chinois : là, les enfans malheureux s’exposent où se mettent à mort ;