Aller au contenu

Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/339

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

douter de mon malheureux sort. O Justine ! je suis perdue, si tu ne parviens à me délivrer ; tout, ma chère amie, tout me prouve que ces monstres vont me faire servir à quelques-unes de leurs expériences.

Oh ciel ! dit Justine, en interrompant la fille de Rodin, est-ce que pareille chose leur est déjà arrivée ? — J’ai de fortes raisons pour le croire ; quand ils tiennent ici des jeunes personnes de l’un ou l’autre sexe, qui n’ont ni père ni mère. — Eh bien ! tu me fais trembler. — Elles disparaissent sans qu’il soit possible de savoir ce qu’elles sont devenues ; il n’y a pas un mois qu’une jeune fille de quatorze ans, belle comme le jour, disparut ainsi, et je me souviens très-bien que ce jour-là, j’entendis des cris étouffés dans le cabinet de mon père ; le lendemain on dit qu’elle s’était sauvée. Quelque tems après un jeune orphelin de quinze ans s’éclipsa de même, et on n’en a pas reparlé davantage ; je frémis, en un mot, ma chère, si tu ne réussis pas à me tirer promptement de ce cachot.

Justine demanda à son amie si elle savait ou l’on mettait les clefs de cette cave ; Rosalie l’ignorait, elle ne croyait pourtant pas que l’on eût l’habitude de les emporter ; Jus-