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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/37

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long-tems ; je trouverai peut-être jusques-là des ames moins dures, des cœurs plus compatissans, et en prononçant ces paroles, le premier mouvement de Justine fut de compter son petit trésor ; elle ouvre sa commode… Oh ciel ! elle est volée… il ne lui reste que ce qu’elle a dans sa poche, arrivant à peine à six livres. Je suis perdue, s’écrie-t-elle ; ah ! je vois trop d’où le coup part ; cette créature indigne veut, en me privant de toutes mes ressources, me contraindre à me jetter dans le sein du crime ; mais !… que dis-je, hélas ! poursuivait-elle en larmes, n’est-il donc pas trop vrai qu’il ne me reste plus d’autres moyens de prolonger ma vie, et dans le cruel état où je suis, ce malheureux, ou quelqu’autre peut-être, plus méchant encore, ne deviennent-ils pas les seuls êtres dont je puisse attendre quelques secours !

Justine au désespoir descend chez son hôtesse : Madame, lui dit-elle, je suis volée ; c’est chez vous que s’est fait le coup ; c’est dans un meuble à vous que l’argent a été pris… Hélas ! c’est tout ce que je possédais ; c’était le reste infortuné de la succession de mon père ; privée de cette faible ressource, il ne me reste plus que la mort. Oh ! madame, rendez-