Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/46

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partie de son existence ? Considérerons-nous le libertinage d’un être de notre espèce, relativement à la société ? Certes, je crois qu’il est rare de trouver une action plus agréable au sexe qui partage avec nous le monde, que celle de la prostitution d’une jolie femme ; et où en serait-il, ce sexe, si toutes, entichées des faux systêmes de vertu que des imbécilles nous prêchent, s’obstinaient à ne jamais offrir que des refus aux desirs effrénés des hommes ? Réduits à se branler ou à s’enculer entr’eux, il faudrait donc qu’ils renonçassent totalement à notre commerce ? Car, tu m’avoueras que le mariage ne saurait fixer ; il est tout aussi impossible à un homme de s’en tenir a une seule femme, qu’à celle-ci de se contenter d’un seul homme. La nature déteste, abjure, contrarie tous ces dogmes de votre absurde civilisation, et le tort de votre logique imbécille ne devient pas celui de ses loix ; n’écoutons qu’elle, et nous ne serons jamais trompés. En un mot, Justine, crois-en quelqu’un qui a de l’expérience, de l’érudition, des principes, et sois persuadée que ce qu’une jeune fille peut faire de mieux et de plus raisonnable dans le monde, c’est de se prostituer à tous ceux qui veulent d’elle, en conservant.