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mes habitudes auxquelles je vous prie de ne pas me faire renoncer… Ah ! j’oubliais de vous montrer votre chambre, elle tient à ces deux cabinets, absolument retranchée derrière eux ; c’est une espèce de forteresse… d’ailleurs jolie, un bon lit… à ma sonnette en cas de besoin, vous le voyez ; je vous laisse chez vous, mon cœur, en me félicitant d’avoir pu faire quelque chose qui vous soit agréable.

Justine ne fut pas plutôt seule, que sa profonde sensibilité lui arracha de nouvelles larmes. Eh quoi ! disoit-elle, en voyant l’avilissement de son sort, cette femme qui me retire, à ce qu’elle prétend, dans sa maison par estime pour ma vertu, se plaît pourtant à m’avilir au point de me destiner un emploi aussi bas que celui que sa fierté me propose ! Et pourquoi donc, dès que tous les individus se ressemblent, faut-il qu’il y en ait de condamnés à rendre aux autres des services aussi humilians que ceux-là ? O douce égalité de la nature ! ne regnerez-vous donc jamais chez les hommes ?

On appelle Justine pour dîner ; elle fait connaissance avec ses trois compagnes, toutes trois jolies comme des anges. Le soir elle commence ses honorables fonctions ; d’abord