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la garde-robe, ensuite le bidet ; Justine conduisait l’éponge, imbibait, lavait, nétoyait, et tout cela dans un silence qui lui parut fort extraordinaire ; il semblait que la dignité de madame la comtesse Delmonse se fût compromise en conversant avec sa servante, ou peut-être, et c’est ce que nous avons cru de préférence, madame Delmonse, se taisait-elle pour ne pas compromettre le grand secret qui concernait sa chétive esclave.

Cependant l’observatrice et judicieuse orpheline ne fut pas long-tems sans s’appercevoir que les exemples de vertu qu’on lui avait assuré vouloir prendre d’elle, n’avaient pas encore fait une sainte de sa respectable maîtresse ; profitant de l’absence de son mari, la coquine s’en donnait sans ménagement, et les orgies qui se célébraient dans le voluptueux boudoir attenant aux deux pièces confiées aux soins de Justine, la convainquirent bientôt du peu de sincérité de la conversion de cette femme ; une fois même, deux ou trois jeunes gens s’échappèrent dans ces cabinets de propreté, et insultèrent assez vivement Justine qui y procédait à ses fonctions ; elle s’en plaignit ; à peine eut-on l’air de l’entendre, et la vertueuse créature, en projettant