Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/296

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il ait aussi-tôt la puissance de le corrompre ou de le tourner à son profit. Je n’éprouvai, je dois en convenir, d’autre mouvement, en embrassant Marianne, que ceux de la lubricité. La jolie élève à former, dis-je bas à Chabert : oh ! je veux préserver celle-là des fautes qui firent quitter Paris à sa mère, et de celles qui firent pendre la Durand à Venise ; je lui ferai si bien sentir la nécessité du crime, qu’elle n’en quittera jamais la route ; et si jamais la vertu voulait se faire entendre au fond de son cœur, je veux qu’elle y trouve le vice si bien établi, qu’elle n’ait même pas la possibilité de l’attaque.

Chabert, qui avait présidé à l’éducation de Marianne, se plut à me faire admirer tous ses petits talens ; elle était musicienne, dansait à merveille, dessinait joliment… parlait italien, etc. Et le tempéramment, dis-je à l’abbé ? Je crois qu’elle en aura, me répondit Chabert, et si l’on n’y prend garde, la petite fripone se branlera bientôt. Je l’aiderai, dis-je, je jouirai singulièrement à recueillir les premières preuves de sa nubilité. Il faut attendre, me répondit l’abbé, ou vous risqueriez sa santé ; mais cette considération me touchait peu. L’abbé, qui était venu plu-