Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/234

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tête orgueilleuse du chêne plie sous l’orage qui le balotte ? Si la nature était offensée de ces goûts, elle ne nous les inspirerait pas ; il est impossible que nous puissions recevoir d’elle un sentiment fait pour l’outrager, et dans cette extrême certitude, nous pouvons nous livrer à nos passions, de quelque genre, de quelque violence qu’elles puissent être, bien assurés que tous les inconvéniens qu’entraîne leur choc, ne sont que des desseins de la nature, dont nous sommes les organes involontaires ; et que nous font les suites de ces passions ? lorsqu’on veut se délecter par une action quelconque, il ne s’agit nullement des suites, — Je ne vous parle pas des suites, interrompit vivement Justine ; il est question des résultats : assurément, si vous êtes le plus fort, et que, par d’atroces principes de cruauté, vous n’aimiez à jouir que par la douleur, dans la vue d’augmenter vos sensations, vous arriverez insensiblement à les produire sur l’objet qui vous sert, au degré de violence capable de lui ravir le jour. — Soit ; c’est-à-dire que, par des goûts donnés par la nature, j’aurai servi les desseins de la nature, qui, n’opérant ses créations que par des destructions, ne m’inspire jamais l’idée de celles-ci,