Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/264

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l’homme, unique agent de ses caprices, lui obéit perpétuellement sans qu’il s’en doute. D’après cela, dit Honorine, tous les moyens sont donc bons pour améliorer une jouissance en sens pervers ou criminel ? — Tous, assurément, tous, il n’en est pas un seul qui doive être négligé ; et c’est à l’homme vraiment voluptueux à rechercher avec soin tous les moyens de perversité possible dont il puisse accroître sa jouissance ; il ne doit s’en refuser aucun ; il est coupable envers la nature s’il s’impose sur cela le moindre frein ; si tous les hommes pensaient comme cela, dit Justine, la société deviendrait un bois où chacun n’aurait pour but que d’égorger celui qui le gênerait. Et qui doute, reprit le moine, que le meurtre ne soit une des loix la plus précieuse de la nature ? Quel est son but quand elle crée ? n’est-ce pas de voir bientôt détruire son ouvrage ? Si la destruction est une de ses loix, celui qui détruit, lui obéit donc ? Et tu vois quelle masse de crimes s’élève de cet argument. Voilà, dit Honorine, qui justifie toutes vos méchancetés avec nous. — Assurément, ma chère, répondit Sylvestre, parce que je regarde la méchanceté comme le ressort le plus certain de tous les crimes ; c’est