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dévore, et qui me porte à me venger de la plus cruelle manière des faveurs que je dérobe ou que j’obtiens volontairement. Pressons-nous d’endosser le manteau de la philosophie ; il sera bientôt pour moi celui de tous les vices. Et c’était à vingt ans que je raisonnais ainsi.

Moldane, était le nom du robin chez lequel je me présentais : il ne tarda pas à me donner toute sa confiance. Il s’agissait d’élever ensemble un jeune homme de quinze ans, qui se nommait Sulpice, et la sœur de ce jeune homme, nommée Joséphine, qui n’avait encore que treize ans. C’est sans exagération que je puis vous assurer, mes amis, n’avoir vu de mes jours rien d’aussi joli que ces enfans. D’abord la gouvernante de Joséphine présidait aux leçons ; peu après, cette précaution parut inutile, et les deux charmans objets de mes ardens desirs me furent abandonnés sans réserve.

Le jeune Sulpice, que j’étudiais avec attention, me laissa bientôt appercevoir deux côtés faibles en lui ; d’abord un tempéramment de feu, secondement, un amour excessif pour sa sœur. Bon, me dis-je, dès que j’eus découvert ces deux points, me voilà bientôt sûr du