Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/342

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fais-y mettre la somme qui lui sera nécessaire 20, 30 mille francs, ne te gênes pas, mon ami ; je sais que tu es raisonnable, et qu’il te serait impossible d’abuser de ma confiance. — Oh ! monsieur. — Pars, mon ami, dis-lui que je soupe et que je l’attends sans faute au dessert.

Tout était préparé, sans que le cher homme s’en doutât, la maison louée, les meubles vendus, les valets congédiés, et le souper qu’on lui servait était le dernier qu’il devait recevoir de nous. Une chaise de poste nous attendait aux Chartrons[1] ; Joséphine était dans cette voiture, et le coup une fois fait, nous disparaissions de Bordeaux. J’arrive chez le Juif ; je parle aux commis, dont je suis parfaitement connu. Le correspondant de monsieur Abraham, leur dis-je, est chez nous ; il demande sur-le-champ les fonds qu’il remit hier à votre patron ; voilà un blanc-sein, remettez-moi, je vous prie, le porte-feuille sur-le-champ. Ah ! dit le premier commis, je sais ce que c’est ; on m’avait prévenu qu’il y aurait quelque changement dans cette affaire, mais j’ignorais que la conférence dût se passer

  1. Superbe quai de Bordeaux, où demeurent tous les négocians.