Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/343

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chez vous. Tenez, voilà ce qu’il demande, je vais mettre seulement au-dessus de la signature : « Remettez à M. Jérôme le porte-feuille reçu hier ». N’est-ce pas cela ? — Assurément. — Bien votre valet, M. Jérôme. — Votre serviteur, M. Isaac, et me voilà dans la voiture.

Nous marchâmes huit jours sans arrêter ; et ce ne fut que sur les bords du Rhin, que, nous croyant en sûreté, nous descendîmes, excédés, dans une mauvaise auberge, pour nous y reposer quelque tems. Eh bien ! mon ange, dis-je à Joséphine en venant de vérifier la somme ; tu vois comme nos coups d’essais réussissent ; du courage, de l’effronterie, et nous serons bientôt à notre aise. Cette route est celle de Berlin ; c’est un bon pays que la Prusse ; un roi philosophe y règne ; volons-y ; il vaut autant escroquer des barons allemands que des Juifs gascons ; et de quelque part que nous vienne l’argent, quand il est pris, on peut être sûr qu’il porte bonheur. Ce ne sera pas, me dit Joséphine, quand tu le mangeras aussi vîte que nous le gagnons. — Qu’ai-je eu, moi, de tout ce profit ? à peine quelques robes et quelques bijoux ; tu as dissipé le reste avec des gueuses et des bardaches ; tes luxures, tes désordres en tout genre, ont été aussi