Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/362

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

heurs affreux. Ah ! monseigneur, dis-je en baisant les mains de Henri, que j’estime ces principes dans vous ! chaque homme, en les admettant, peut se flatter de despotiser dans sa classe ; il n’est qu’esclave et vil, s’il veut usurper le pouvoir des grands.

Le prince de Prusse, singulièrement satisfait de moi, me laissa vingt-cinq mille francs pour gages de sa bienveillance, et ne quitta presque plus notre maison. J’aidais ma sœur à lui trouver des hommes ; et, pas tout-à-fait aussi difficile que lui, je m’accommodais à merveille de ce dont il ne voulait pas ; aussi, puis-je certifier avec raison que pendant deux ans que dura notre séjour dans cette ville, il me passa au moins plus de dix mille vits dans le derrière. Il n’y a point de pays dans le monde où les soldats soient aussi beaux et aussi complaisans ; et, pour peu qu’on sache s’y prendre, on en a tant, qu’on est obligé d’en refuser.

Nous n’étions pas tellement gênés, que nous ne puissions mystérieusement associer quelques seigneurs de la cour aux plaisirs du prince Henri ; et le comte de Rhinberg partagea long-tems les faveurs de la maîtresse du frère de son maître, sans que qui que ce