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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 5, 1797.djvu/120

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vent être basées sur le bonheur individuel ; si elles n’assurent pas ce bonheur, elles sont ridicules ; si elles y nuisent, elles sont atroces, et une nation sage doit travailler sur-le-champ à la prompte réforme de ces mœurs dès qu’elles ne servent plus au bonheur général ; or je demande qu’on me prouve qu’il y a quelque chose dans nos mœurs françaises qui, relativement au plaisir de la chair, puisse coopérer au bonheur de la nation ; en vertu de quoi contraignez-vous cette jeune fille à conserver son pucelage, malgré la nature qui lui dit de le perdre, et malgré sa santé que cette sagesse dérange ! Me répondrez-vous que c’est pour qu’elle arrive pure dans les bras de son époux ; mais cette prétendue nécessité est-elle autre chose que l’histoire des préjugés ? Quoi pour faire jouir un homme du frivole plaisir de moissonner des prémices, il faut que cette malheureuse se sacrifie dix ans ; il faut qu’elle fasse de la peine à cinq cents individus, pour en délecter tristement un seul ? Existe-t-il quelque chose de plus barbare et de plus mal combiné que cela ? Oh, je vous prie, l’intérêt général est-il plus cruellement immolé que dans des loix aussi absurdes ? Vivent à jamais les na-