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leurs discussions doivent être perpétuelles. Cet hommage que le scélérat rend à la vertu, n’est donc encore qu’égoïste ; ce n’est pas l’idole qu’il encense, c’est le repos dont elle le laisse jouir. Mais, vous dit-on quelquefois, le sectateur de la vertu y trouve une jouissance, d’accord ; il n’y a sorte de folie qui ne puisse en donner ; la jouissance n’est pas ce que je nie, je soutiens seulement que tant que la vertu est jouissance, non-seulement elle est vicieuse, je l’ai démontré, mais qu’elle est faible, et qu’entre deux jouissances vicieuses, je dois me déterminer pour la plus vive.

Le degré de violence dont on est ému, caractérise seul l’essence du plaisir ; celui qui n’est que médiocrement agité par une passion, ne peut jamais être aussi heureux que celui qu’une passion forte remue vivement ; or, quelle différence d’émotion entre les plaisirs que donne la vertu, et ceux procurés par le vice ; celui qui prétend avoir éprouvé quelque bonheur à remettre aux mains d’un héritier le fidéicommis d’un million, dont il était secrètement chargé, je le suppose, pourra-t-il soutenir que cette portion de bonheur a été aussi forte que