Aller au contenu

Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 5, 1797.djvu/279

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

votre mère. — Eh bien. — Leur existence pouvait me trahir… il fallait que je les sacrifiasse, ils ne sont morts, à peu de distance l’un de l’autre, que d’un breuvage que je leur fis prendre dans un souper chez moi… Un frémissement subit s’empare ici de toute mon existence ; mais fixant aussitôt Noirceuil avec ce flegme apatique de la scélératesse qu’imprimait malgré moi la nature au fond de mon cœur : Monstre, je te le répète, m’écriai-je… tu me fais horreur, et je t’aime. — Le bourreau de ta famille. — Et que m’importe, je juge tout par les sensations ; ceux dont tes crimes me séparent, ne m’en faisaient naître aucune, et l’aveu que tu me fais de ce délit, m’embrâse, me jette dans un délire dont il m’est impossible de rendre compte. Charmante créature, me répondit Noirceuil, ta naïveté, la franchise de l’ame que tu me développes, tout me détermine à transgresser mes principes ; je te garde, Juliette, je te garde, tu ne retourneras plus chez la Duvergier. Mais monsieur… votre femme. — Elle te sera soumise, tu régneras dans ma maison, tout ce qui l’occupe sera sous tes ordres ; on n’obéira qu’à toi seule ; voilà l’empire du crime sur