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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 5, 1797.djvu/296

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sait une pucelle qui ne pouvait pas avoir plus de quinze ans et jamais moins de dix : il donnait cent écus par chacune de ces filles, et la Duvergier vingt-cinq louis de dommages et intérêts, si, Noirceuil pouvait prouver que la fille ne fut pas exactement vierge. Malgré toutes ses précautions, mon exemple vous prouve à quel point il était trompé chaque jour.

Cette séance de libertinage avait ordinairement lieu tous les soirs : les deux gitons, madame de Noirceuil et moi ne manquions jamais de nous y trouver, et chaque jour la tendre et malheureuse épouse devenait la victime de ces piquantes et singulières luxures. Les petites filles se retiraient et je soupais tête-à-tête avec Noirceuil, qui se grisait assez communément et finissait par s’endormir dans mes bras.

Depuis long-tems, il faut enfin que j’en convienne avec vous, mes amis, je brûlais de mettre en action les principes de Dorval ; il semblait que les doigts me démangeassent ; je voulais voler, à quelque prix que ce pût être. Mon épreuve n’était pas encore faite ; je ne doutais pas de mon adresse ; je n’étais embarrassé que du sujet avec lequel je devais l’employer ; j’avais le plus beau jeu du